Intéressant cette petite balade du président US aux marches de l'Est...Est-ce vraiment pour le plaisir de provoquer son camarade Poutine et de préparer dans les meilleures conditions possibles la prochaine partie d'un nouveau Grand Jeu en Asie Centrale ou ailleurs ? M'est avis que cette affaire a peut-être davantage à voir avec l' Europe.
En faisant vibrer la corde sensible du sentiment anti-russe qui a, dans les pays baltes ou en Pologne, des raisons d'exister, différents objectifs peuvent être poursuivis. Aux Etats-Unis mêmes, raffermir la fidélité politique des électorats originaires de ces pays. Lier plus fortement encore aux intérêts américains la frange orientale de la nouvelle majorité européenne comme cela s'est fait avec Madrid et Rome, en exploitant les tendances françaises à un Directoire européen avec l'Allemagne. Préparer peut-être une présence militaire américaine dans l'est du continent, du côté de Kaliningrad, qui compléterait la référence à l'OTAN dans le projet de traité constitutionnel et musèlerait bien les sorties russes sur la Baltique. Et, ce qui ne gâte rien, gêner la réimplantation économique et politique de l'Allemagne dans une zone qu'elle a traditionnellement sous son influence : il s'agirait de s'insérer entre la Russie et la RFA, qui sera probablement retenue comme partenaire n°1 des USA en Europe. Du concret, tout cela.
Ce qui semble sûr c'est que pendant que certains s'agitent sur leurs chaises en rêvant d' une Europe fédérale ou se livrent à la diplomatie spectacle, nos amis américains bougent et font valoir leurs atouts dans ce qui est censé être notre pré carré. A quand un déplacement officiel au Québec ou en Louisiane pour notre président ? Saint-Pierre et Miquelon, la Caraïbe, la Guyane, les endroits ne manquent pas pour que la France montre un nouveau profil, crée des universités régionales, fasse valoir son nouveau pavillon marchand, affiche sa culture et sa rupture avec le colonialisme et l'esclavage, propose de nouveaux espaces économiques de développement. L'affirmation d'une défense globale et d'un autre modèle politique doit se faire dans l'espace mondial, non en circuit fermé et dans un cadre géographique à la fois limité en indépendance réelle, en fondements éthiques et en faculté d'initiative.