Que l'électorat ait voulu faire passer un message fort au Chef de l'Etat, c'est indiscutable et après tout, les élections sont le seul moyen de le faire en-dehors de la rue. Mais le hasard du calendrier électoral a voulu que ce soient les élections municipales qui servent de vecteur au mécontentement, alors qu'elles sont en principe destinées à élire celles et ceux qui, sur le terrain, sont là pour assurer en période de crise la solidarité, le développement économique, l'Education laïque pour tous, bref tout ce dont la France a besoin pour se construire et se reconstruire. A noter que les électeurs, dans la plupart des cas, n'ont pas voulu que cet avertissement profite à l'extrême-droite, mais bien à la droite de gouvernement, ainsi sauvée par le gong malgré les affaires qui pleuvaient sur elle et un passé d'échec encore très récent : le cycle politique tend à s'accélérer. En quinze jours l'UMP est passée du statut d'accusée à celui de triomphatrice...
Dans certaines villes, principalement dans les Régions, la droite républicaine pouvait répondre aux conséquences du message en proposant une jeune garde comme élément de changement acceptable, offrir un "coup de neuf". Dans d'autres, comme hélas dans la plupart des villes des Hauts-de-Seine, c'est le club des affairistes, des receleurs voire des voleurs issus du système Pasqua qui a raflé la mise, la conjoncture politique venant en quelque sorte faire un pied de nez au travail de la Justice. Plus que jamais, les "agglos" (GPSO par exemple) se retrouvent à la botte de l'UMP altoséquanaise alors qu'elles gèrent une large partie du quotidien de tous dans des conditions souvent très discutables, faisant naître entre autres un phénomène de résonance fiscale* ; un comble, à l'heure où les mêmes reprochent violemment au gouvernement son matraquage fiscal.
Il n'est que de lire les réactions des uns et des autres pour s'en assurer : à Levallois, le sulfureux couple BALKANY triomphe de façon indécente, à Puteaux Joëlle CECCALDI-RAYNAUD vient de déverser un tomberau de délégations sur la tête de... son propre fils, nommé de facto vice-roi de Puteaux ! Ailleurs bien des caciques de l'UMP compromis ou condamnés dans diverses affaires ont été élus ou réélus au premier tour. Bref, le remugle des Ecuries d'Augias empeste toujours davantage et notre département continue à se "berlusconiser". Un rendu pour un prêté, d'ailleurs, puisque selon Charles PASQUA soi-même (Mémoires, T2), ce sont justement Jean-Jacques GUILLET et William ABITBOL, deux anciens compères en extrême-droite, qui avaient servi de consultants au Cavaliere en prélude à la création de FORZA ITALIA. L'Europe de l'affairisme prospère toujours...et qui se ressemble, s'assemble !
O paradoxe ! Le message populaire, c'est au niveau national que les priorités choisies ne sont pas les bonnes, que le gouvernement juge essentielles des choses qui pour être importantes ne sont pas jugées vitales et que sur ce qui compte d'abord pour l'immense majorité c'est-à-dire l'emploi, le logement et la santé, l'espoir n'est pas encore, ou plus là. Il est aussi que la crédibilité de ceux que l'on est convenu de nommer classe politique s'affaiblit dangereusement, qu'en matière d'éthique le ravalement de façades ne suffit pas et que le mélange des genres entre public et privé est une dangereuse hérésie. Aux dirigeants nationaux d'en tirer les bonnes conclusions...et la bonne action.
Localement par contre, comme chez nous, le vote-message peut aboutir au résultat inverse de celui qu'il recherche : faire régner l'omertà sur des passés douteux ou regarder ailleurs alors que les preuves existent ; empêcher tout développement local, donc toute création d'emplois pérenne avec des arrières-pensées politiciennes ; enrichir les promoteurs sans valeur ajoutée pour la vie locale; appauvrir la population à coup d'impôts et de loyers exorbitants ; oublier la solidarité, qualifiée d'assistanat ; mettre l'Education publique et populaire au piquet en cherchant à favoriser l'école de classe et à asservir le secteur associatif.
On peut toujours se dire que l'on ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs, qu'il faut raisonner globalement etc. Mais on peut aussi penser que c'est se tirer une balle dans le pied que de garantir à des élus que leur passé et leur gestion recommandent de ne pas confirmer dans leurs fonctions, six années supplémentaires pour consolider leurs mauvaises pratiques et asseoir leur pouvoir...ou leur retraite.
Qu'il est donc difficile d'être citoyen !
* Ce que nous désignons ainsi, c'est le fait, par le jeu des attributions de compensation équilibrant les comptes des villes par rapport aux EPCI dont elles font partie, de renvoyer des lignes de fiscalité des ménages vers ces EPCI (Etablissements Publics de Coopération Intercommunale). La fiscalité communale s'en trouve aini artificiellement dégonflée, alors que l'imposition totale du contribuable reste bien évidemmment la même. Ces lignes supplémentaires n'ont aucune raison d'être, dans la mesure où les EPCI devraient, si elles étaient bien gérées, largement s'en sortir avec la fiscalité des entreprises établies sur leur territoire.