UE :
Ne gonflons pas trop le ballon, évitons l'explosion !
Facile et difficile, le choix...
Dans dix jours, les élections européennes ! Parmi ceux qui ont déjà décidé de voter, nombreux sont les électeurs qui hésitent encore. Voter pour ou contre l’Union Européenne, assimilée (à tort) à l'"Europe"? Si l’on est mécontent du gouvernement, sanctionner ce dernier en votant à droite comme aux municipales ? Pour les fidèles d’un parti, voter pour la liste officielle sans être trop regardant sur sa composition ? Tenter, parmi plus de 30 listes qui se présentent, souvent pour des raisons alimentaires (« seuil » de remboursement à 3%) d’en trouver une qui soit en résonance avec ses propres idées?
Il est vrai qu’on ne facilite guère la vie au citoyen, tant les incohérences politiques et humaines, le flou, le non-dit se sont ingéniés à brouiller les cartes pour ce que l’on s'obstine à nous présenter comme le passage obligé du destin de la France : élire nos représentants au Parlement Européen. Comme si, n'ayant rien à dire sur un projet national dans un pays de 65 millions d'habitants, il fallait d'abord se dissoudre dans un sous-ensemble flou pour inventer un nouveau vivre ensemble...
Notre modeste propos sera ici de tenter d’aider ces citoyens méritants qui refusant tout à la fois nihilisme, conformisme et fuite en avant, cherchent à remettre les choses à leur place de façon à pouvoir décider sainement, en adultes majeurs, de ce qu’il croient être dans l’intérêt d’une communauté, la France mondiale, à laquelle elle ou il appartient.
La France, revenue de loin...
Voici en effet un Etat, la France, à qui il a fallu trente ans pour se reconstruire après la dernière guerre et que Russes, Britanniques, Américains et beaucoup d’autres dont des Français aient, au prix de sacrifices terribles, réussi à abattre les divers fascismes européens ainsi que la clique impériale nipponne. On le doit d’abord au travail de ses citoyens dont beaucoup de nouveaux Français mais aussi à l’intelligence, l'habileté et la hauteur de vues de certains de ses gouvernants.
On le doit aussi à la vigueur d’un Etat sûr de lui, utile, rigoureux ; à l’affirmation sans complexes de quelques idées solides comme le Plan, la nécessité d’une défense indépendante et dissuasive au service d’une politique extérieure libre d'influences d’ autres Etats, grands ou petits et comme la prise en compte de ces dimensions essentielles à notre nation que sont une culture partagée dans le monde et la vocation océanique de notre République.
Cette politique n’était pas anti-européenne, elle affirmait simplement et avec raison que tout en sachant pratiquer la réconciliation, notre pays était assez grand pour affirmer et propager ses propres valeurs, forgées au feu de l’Histoire et partagées avec bien d’autres peuples non européens. Elle affirmait aussi que ces valeurs, universelles étaient d’abord politiques et morales, non de nature économique car l’économie n’est pas une Valeur et ne saurait en créer ; et la soi-disant mondialisation, qui en tant que thème politique n’est rien d’autre qu’un avatar du libre-échangisme, encore moins. Elle affirmait enfin qu'on ne pouvait réussir qu'en se portant en avant et non en ressassant constamment les raisons et les moyens de sa propre auto-dissolution dans un sous-ensemble flou. Et c'est toujours vrai.
C’est d’ailleurs tellement vrai que c’est précisément au nom des valeurs de la France et de notre République que l’on voit notre gouvernement continuer à se lancer, dans nos zones d’influence traditionnelle et même dans quelques autres, dans des actions qui ne semblent pas bénéficier d’une grande solidarité « européenne ». Nous savions pourtant à quoi nous attendre car dans le projet de TCE que le peuple français a refusé mais que ses députés ont grosso modo accepté, on pouvait déjà lire, entre les lignes certes, que les partenaires de la France faisaient avant tout confiance aux Américains pour leur défense (s'ils s'en souciaient) et que la France n’avait qu’à se payer ses « jouets » nucléaires et ses forces d'intervention si elle en avait envie…comme chez ces hiérarques de républiques italiennes du XVIème siècle qui, préférant louer des "condottieri" plutôt que de faire appel au peuple, se trouvaient bien mal placés s'ils se fâchaient.
...veut se réinsérer dans un ensemble, mais lequel ?
La France, et c’est très important, est le noyau d'une culture mondiale, alternative au monde dit anglo-saxon. Elle n'engage donc pas qu'elle-même mais bien tous ceux - plusieurs centaines de millions de citoyens dans le monde- qui se reconnaissent de cette culture. Elle ne saurait donc se réduire, sous prétexte d'esprit euroépen, à n'être qu'une simple cellule hexagonale dans une ruche européenne où la Commission jouerait à la fois la reine pondeuse de textes et règlements et le roi-soliveau du système. Or cette ruche économique vibre en fait d'un tropisme essentiellement libéral, le profit établi en régulateur du système. Le miel apporté ou produit ne profite pas à toutes les ouvrières, loin de là et il y a sans doute trop de faux-bourdons. Et il y a peu de chance que cela change, même si le sympathique Martin SCHULZ devait, au grand dam de "sa" Chancelière, présider la Commission Européenne.
Cela cependant pourrait être acceptable car l’économie de marché – partout tempérée cependant par la présence des états qui sert d’amortisseurs, de re-distributeurs ou d’assureurs- s’est imposée, ce qui ne veut nullement dire qu’elle soit bonne par essence mais que, comme il en va de la démocratie au plan politique, on n’a pas encore trouvé mieux, y compris dans des pays restés officiellement totalitaires, pour nourrir plus ou moins bien la population de la planète. Ce serait acceptable, s'il y avait espoir que l'UE intègre clairement dans ses objectifs une politique sociale.
Ce serait acceptable, tant qu’on ne parle pas politique et que l’on considère que l’UE reste une zone d’échanges privilégiées où les gros bras peuvent vendre tranquillement sans être trop embêtés par les règlements et où l’on évite les catastrophes financières en régulant la devise commune pour ceux qui ont choisi cette option. Les USA en ont donné l’exemple sur leur continent et se préparent à faire de même avec le nôtre, à leurs conditions bien sûr. Ils vendent déjà à l'Europe marchande leur hardware militaire et contrôlent les programmes qui vont avec, alors...
Pas pour adorer le Veau d'Or, de préférence...
Mais, et c’est là un des problèmes majeurs de l’actuelle Union d’inspiration libérale, elle ne s’en tient justement pas là et pour jeter les bases d'un « gouvernement européen » se fonde curieusement sur une analyse assez proche du marxisme, suivant laquelle les phénomènes politiques ne seraient qu’une dérivée des rapports de force économiques.
Adorons la Concurrence Libre et Sans Entraves...
Alors, on recrée un Veau d'Or au travers du thème, l'Economie d'abord ! A certains moments d’ailleurs, on peut se demander si cette étrange croyance n’a pas contaminé, sous l’influence du mélange des genres et de la culture du court terme qui marquent la période actuelle, bien des dirigeants progressistes qui semblent penser qu’on peut mettre en œuvre une politique qui ne correspond pas à ses propres idées ou tout au moins à celles que l'on affiche. Bref, que gouverner et administrer c'est la même chose.
Le problème, c’est que le simple citoyen, surtout dans un pays de culture mondiale comme la France mais aussi par exemple les Pays-Bas refuse, lui, instinctivement l’idée d’un super-état fédéral qu’on voudrait lui imposer sur ces bases et à marches forcées. Et comment le lui impose-t-on ? Par le biais de ce levier de pouvoir qu’est l’euro, aux mains de ceux qui ont la charge de son fonctionnement. En effet, le sous-groupe de l’UE qui « fait tourner » l’euro s’est obligé par le fait même à une politique économique censée défendre celui-ci, sur la base de la doxa économique du moment, libérale bien sûr.
Finance, ou économie ?
Or l’UE, sous l’influence des « penseurs » libéraux, a voulu créer une Banque centrale indépendante comme aux Etats-Unis. La seule différence, c’est que le gouvernement de Washington rappelle de temps en temps à l’ordre sa Réserve Fédérale car pour paraphraser un aphorisme célèbre, il sait que l’économie est une chose trop sérieuse pour laisser les économistes et a fortiori les financiers s‘en occuper seuls et que ce qui compte d'abord, c'est l'intérêt de l'Union (américaine) et de ses citoyens, en particulier en ce qui concerne l'emploi.
Comme pour les médecins de Molière, les financiers ou plus exactement les budgétaires ont une solution à tous les maux : la purge, ici la réduction à 3% des déficits courants que gouvernements de droite comme de gauche ont longtemps laissé prospérer sans que ni l’UE ni les hommes en noir ne s’en formalisent et alors même qu’ils étaient censés être les gardiens du Temple budgétaire. Qu’il vaille mieux ne pas continuer à faire tourner une planche à billets européenne pour financer (même à des taux d'intérêt aujourd'hui très faibles) des dépenses discutables, tout le monde ne peut qu'être d’accord là-dessus. Que se contenter de biffer des dépenses publiques donc a priori suspectes (sauf s'il s'agit de renflouer des banques, bien sûr) suffise à restaurer l'essentiel c'est-à-dire l'emploi et le bien être pour tous, cela reste à démontrer et c'est justement ce qui n'a été fait par personne. Peu importe, cette histoire de dette publique est devenue, contre toute évidence et au mépris de toute logique, l'alpha et l'oméga du discours en France, faisant d'une condition probablement nécessaire une condition suffisante et confondant allègrement symptômes, disgnostic et traitement.
Ce sont pourtant ces analyses aussi sommaires qu’incertaines négligeant l’importance prospective quantitative et qualitative des marchés des biens et de l’argent, l’équilibre des échanges extérieurs, la nécessité d’une fin sociale aux entreprises humaines, la solidarité internationale et écologique etc., qui servent parfois de base (dans l'Europe méditerranéenne...) à des mesures brutales (vente de pans entiers d'entreprises publiques à des intérêts financiers privés, matraquage financier des ménages et réduction des salaires etc.).
Elle risquent par contre à tout moment de compromettre une reprise fragile car de plus en plus fondée sur la consommation de biens souvent fabriqués ailleurs de surcroît : tout comme sa base politique, la base du dynamisme économique de l'Union est fragile, surtout pour les pays qui n'ont pas su, comme l'Allemagne, se constituer de "prés carrés" internationaux, structurer solidement leur tissu de PME/PMI et atteler leurs banques au char de l'économie réelle par le biais de leur actionnariat dans les entreprises.
Un bémol cependant : les avertissements de Bruxelles n’ont pas manqué mais comme d’habitude la France, gouvernée dans les faits par Bercy quel que soit le régime politique, a traîné les pieds. Et comme d'habitude, les mesures arrivent alors au plus mauvais moment.
La valeur ajoutée européenne reste à trouver, au minimum à conforter...
Ce qui est par contre certain, c’est que de très nombreux Européens souffrent, et de plus en plus, d’un système qui dans les faits impose à ceux qui ont voté pour autre chose, d’accepter les contraintes du vote par ordre ou si l’on préfère, qualifié. En France on est revenu, en quelque sorte, avant 1789. Simplement, ce n’est plus la Noblesse et l’Eglise qui officiellement pèsent contre le Tiers Etat, c’est une majorité d'états européens qui n’ont pas les mêmes charges structurelles que la France, ne pratiquent pas tous l’euro et restent liés à de puissantes influences extérieures. Un Européen, une voix ! A l’enseigne de l’UE, ce principe n'a pas cours...
Ce n’est d’ailleurs pas illogique, soyons ici malicieux, dans la mesure où l’on se réfère, pour pratiquer la fuite en avant dans la « Construction Européenne », à des valeurs cousines de celles de la coalition européenne qui s’opposait à la 1ère République et à ses entreprises, jugées à l’époque aussi sanguinaires que contre nature. A la bonne heure, la Discipline et les sacrifices nécessaires des peuples et leur confiance absolue en la sagesse de leurs Dirigeants politiques et économiques, à nous la défense de la Chrétienté contre l’Athéisme, l’Islam, le Bouddhisme, l’Hindouisme ou le Confucianisme des menaçants Barbares, vive la « civilisation » justifiant le colonialisme économique et l’opposition aux autres puissances continentales comme la Russie etc. Par contre, le racisme en Hongrie, le mariage religieux en Grèce etc.....connais pas, on s'en moque !
Devant le citoyen, le silence assourdissant des techno...
Dès lors le citoyen s’énerve, car il se pose plusieurs questions, auxquelles on s’obstine à ne pas vouloir répondre.
N’a-t-on pas mis la charrue devant les bœufs et sur de telles bases y a-t-il vraiment le feu pour « construire l’Europe », comme on dit ? Quelle est la valeur ajoutée réelle et prouvée de cette construction face aux sujets sérieux comme l'emploi, la négociation avec les Américains, la défense, la culture euroépéenne ? Un supranationalisme européen serait-il nécessairement meilleur que les états-nations, vilipendés par les fédéralistes à tout crin mais qui s’appuient, eux, sur une authentique culture porteuse de diversité et non sur des intérêts économiques mal toujours contrôlés ?
Qui est vraiment le patron dans cette "boutique", entre une Commission qui valorise souvent des politiciens de pays mineurs sur la scène internationale voire de paradis fiscaux notoires comme le Grand-Duché ou Chypre. Cela n’ôte rien à leur valeur éventuelle, bien sûr mais à quoi bon établir des filtres de compétence nationaux si l’on peut les contourner au niveau de l’Union ? S’agit-il pour des dirigeants « socialistes » de vendre une politique qui ne l’est pas, au motif que le vote « par ordre » rétabli par les règles de fonctionnement de l’UE, l’impose ? Pourquoi tous les Etats sont-ils mis à la même enseigne, qu’ils aient des responsabilités mondiales, nécessaires pour l'Europe mais coûteuses, ou n’en aient pas et pourquoi la France recevrait-elle le fouet en classe sans que ses représentants osent évoquer et négocier en cash le coût de sa défense et des opérations extérieures ou la nécessité que l’UE parle réellement français (et allemand) ?
Et lorsque notre citoyen, comme d’ailleurs ses frères « européens » dans d’autres états, exprime son désaccord de façon très claire, on lui explique en substance qu’il est trop bête pour comprendre les idées géniales de la caste des scribes et l’on fait voter au galop l'inverse par des parlementaires aux ordres, alors qu’ils n’ont absolument pas qualité ni mandat pour engager une nation dans un processus de ce niveau et que les engagements qu’ils peuvent prendre n’ont, en conséquence, aucune valeur pérenne. Ce que le Prince fait, il peut toujours le défaire...et dans une démocratie le Prince, c'est le peuple.
Travailler pour le Roi de Prusse, se sacrifier sur l'autel européen ?
Tout cela ne va évidemment pas. De reculade en reculade, la France s’est mise avec une certaine légèreté dans la situation d’un Gulliver emmailloté par les Lilliputiens mais qui cherche pour faire bonne figure à devenir leur principal général dans des guerres externes.
On ne semble pas avoir compris que nous ne sommes plus du tout avec nos amis allemands dans le rapport de l'époque Adenauer-de Gaulle où les faiblesses respectives des deux « revenants » de l’Europe s’équilibraient dans un accord gagnant-gagnant.
Aujourd’hui la France cumule les coûts (du fait notre extension mondiale, de notre défense mais aussi de l’arthrose de notre système étatique auquel personne ne veut réellement toucher dès qu’il s’agit des choses sérieuses) et l’absence de Plan générateur de marchés (pour les Allemands, planificateurs par nature, il existe bien mais dans la tête de leurs dirigeants...), au côté d’une nation réunifiée de 81 Millions d’habitants qui après la « récupération » de la RDA peut compter sur les états de l'Est européen pour lui apporter une main d'oeuvre pas chère, des marchés attractifs, une ouverture vers la Russie et les enjeux mondiaux : le Drang nach Osten ( poussée à l’Est) traditionnel de la politique allemande, avec en prime une Chancelière compétente qui sait fort bien, elle, où elle veut en venir mais ne le raconte pas nécessairement à son partenaire de couple. De Bonn à Berlin la capitale allemande a glissé de 600 km vers l'Est et on serait bien avisé de s'en rendre enfin compte. Et notre représentation au Parlement Européen a naturellement baissé en proportion...
Entretemps, la France accepte docilement les mêmes contraintes que les autres pays de la zone euro, les non-membres étant bien sûr moins concernés mais jouant cependant leur partition souvent plus atlantiste que celle des Britanniques sur les autres contraintes.
On remplace l’analyse objective de la situation par un acte de foi fédéraliste, le recul dans la qualité et la solidité politiques de l’Europe et, il faut bien le dire, la disparition de toute stratégie conquérante d’influence économico-culturelle de la France à l’échelle mondiale. Or, pour la France comme d’ailleurs pour les Etats-Unis, la Culture au sens large (c'est-à-dire en y incluant aussi ce qui relève des Sciences et normes, de la Langue, des Enseignements, du Droit, des Media, des Arts pratiques etc. ) est un puissant facteur de développement économique dans lequel il nous faut, par conséquent, réinvestir et aider nos entreprises à le faire. L’Etat ne doit pas seulement jouer la mouche du coche ou la compagnie d’assurance au bénéfice du privé voire les clients naïfs ou négligents (avec les Partenariats Public Privé comme pour le "Pentagone Français" de Balard !) mais être un entrepreneur, un investisseur comme d'ailleurs bien d'autres (Chine, Qatar, Algérie etc. ) y compris les plus libéraux le sont, y compris pour venir investir... chez nous ! Mais non, pour l’instant Fouquet triomphe encore de Colbert et il semble bien qu'il ait l'oreille du Roi...
Fouquet aurait eu raison......?
En tout état de cause, de même que la poussée à l'Est est un fondamental de la politique allemande, le refus d'une puissance dominante sur le continent en est un autre pour Londres tout comme le statut de la place de Londres. Le nôtre devrait être de revenir à la politique océanique et idéologique que les Républiques menèrent après nos monarques...L'Europe ne pourra réussir à devenir un être politique pérenne qu'en mariant les trois, ce qui conviendra aux puissances moyennes et petites de son espace. Vouloir à tout prix "fédéraliser" une UE boîteuse est une très grave erreur, que tous les hymnes à la Joie et les voyages à Berlin ne suffiront bientôt plus à pallier.
alors qu'elle a des atouts majeurs dans son jeu...
Redisons-le pourtant, la France n’est pas responsable que d’elle-même. Elle a créé et elle est porteuse d’un modèle humaniste, infiniment plus attractif et positif que l’étroit et stérile conformisme européen résultant pour l’essentiel de négociations commerciales ou financières fort peu transparentes en général. Elle doit le respecter et non seulement le défendre mais le promouvoir sans complexes : être ou ne pas être, c’est déjà la question et il ne sert à rien de vouloir l’éviter pour pratiquer la fuite en avant ou l'attristant et ridicule discours "Nous ne sommes plus qu'une puissance moyenne etc..". Se soumettre, c'est déjà disparaître et de cela les Français ne veulent évidemment pas car ils ont, aux yeux de certains, la fatuité de vouloir continuer à exister en tant que tels.
On n’évoquera même pas ici le côté choquant d’une attitude peu amène (oser par exemple qualifier les Britanniques d'anti-européens alors qu'ils ont laissé des centaines de milliers des leurs et des ANZAC ou Canadiens sur les fronts européens de 1914-18 et 39-45 est assez indécent à mon avis) vis-à-vis des nations qui ont vaincu l'Axe en 1945 ni des questions presque anecdotiques par rapport au reste, comme la prolifération des lobbies autour d’un personnel politique « européen » de qualité très variable, les gaspillages et la corruption qui prospèrent aussi à Bruxelles etc.
On n’évoquera pas non plus l’étrange émergence, à l’enseigne du mythique « couple franco-allemand » d’une sorte de Consulat de l’UE, totalement contraire à un esprit fédéral qui devrait respecter les autres Etats gros, moyens ou petits. Qui, dans cette affaire, sera le futur Empereur de l’Europe reste encore incertain. Mais la poussée vers l’Est de l’UE à laquelle nous continuons à souscrire sans réfléchir malgré les grognements significatifs de l’ours russe humilié, nous en donne déjà une petite idée…
On se souviendra par contre que nos amis les Confédérés suisses, instruits par l’Histoire et guidés par un solide réalisme, sont restés beaucoup plus modestes dans leurs ambitions politiques alors que, fondée sur des bases relativement homogènes, l’union de leurs quatre premiers cantons date tout de même de 4 siècles…et qu’ils ont su préserver leurs différences culturelles au travers de conflits internes parfois durs et d’une pratique démocratique constante et basique. Avis aux apprentis sorciers fédéralistes…qui pourraient avoir intérêt à réviser un peu l'Histoire avant de chercher à la faire. Et justement une Confédération, par exemple, pourquoi pas, un jour ?
So What ?*
Ceci étant dit, faut-il en rester à ce portrait à charge et jeter, comme le proposent certains, le bébé avec l’eau du bain ? Faut-il, même si l’on refuse la fausse urgence d’une Europe aux pieds d'argile qui fait toujours davantage penser à une Tour de Babel, s’abstenir de consolider ce qui peut l’être ou d’envisager certaines évolutions ? Et surtout, pour qui voter ?
Nous proposons une petite méthode : lister l’essentiel et poser un vote mais un vote sous condition, qui impose à nos représentants de se conformer à nos désirs et à nos raisons. Tenir compte aussi de la qualité des propositions et du casting des candidats ; en d’autres termes, un électeur n’aurait pas forcément à voter pour les mêmes listes d’une région électorale française à une autre.
*"Et alors ?"
Le piège de l'Euro
L’euro est une question centrale car en établissant un privilège régalien, celui de battre monnaie, il contraint les états qui ont choisi cette option à se coordonner pour une politique économique cohérente. C’est normal et il faut en accepter les conséquences car l’euro apporte un poids et une crédibilité dans les échanges européens avec le reste du monde, il peut devenir une monnaie de réserve et sécuriser ainsi nos approvisionnements énergétiques, il est une manifestation inévitable d'un espace réservé à l'Europe. Encore faut-il voir dans quelles conditions...
Ainsi, il serait erroné d’en déduire qu’il faut se soumettre par principe à une vision libérale et non pondérée du système. Demande-t-on aux pays qui utilisent de facto le dollar des Etats-Unis comme monnaie d’échange de se conformer en toute chose à la vision de Washington ? Le Mexique et le Canada devraient-ils cesser d'exister à cause du roi-dollar ?
Doit-on également accepter que la France, qui fournit gratuitement à l’UE, pour quelque 3 milliards d’euros par an, sa seule composante de défense crédible et indépendante, doive se plier aux même règles que les Etats qui utilisent autrement leur argent et achètent américain ? Nous ne le croyons pas. Nous ne croyons pas non plus que la nécessaire reprise ne puisse venir que des Etats-Unis à condition bien sûr que la vision exclusivement financière de la France et de la BCE soit considérablement amendée. Bien entendu cela ne veut pas dire pour autant que l’arthrose de l’administration d’Etat (bien plus préjudiciable à la France que le soi-disant « mille-feuilles » territorial car il induit les fausses réformes) doive continuer à générer un déficit courant financé sur les marchés.
Le piège où l'on s'est mis...
Mais attention, pour l’instant, l’intégration européenne fonctionne pour la France comme une nasse : bien avant l’arrivée de François HOLLANDE et sous l’influence grandissante d’une vision conformiste, fiscaliste, corporatiste et non réellement politique des affaires, la France s’est mise elle-même dans la situation de devoir répondre à des contraintes financières extérieures, artificielles peut-être mais bien réelles. Or, la reprise mondiale (la cavalerie US, si l’on veut) n’arrivant pas, on va être contraint de tailler dans le vif pour y satisfaire.
Le refus insidieux mais catégorique de l’administration de l’Etat (et principalement de notre « MITI financier » à Bercy) de s’appliquer à elle-même les principes d’une réforme lourde de ses grandes missions (la RGPP d’origine à été mise aux oubliettes au profit de la décimation traditionnelle qui continue à affaiblir les zones déja faibles ou même critiques comme la Justice, la Recherche, certains secteurs de la Défense ou de la Culture etc. mais préserve des pans entiers de bureaucratie inutile) conduit nécessairement à botter en touche en direction des collectivités (qui impulsent largement l’économie aujourd’hui et légalement ne peuvent être en déficit), à diminuer la qualité du vrai service public… et à puiser dans la cassette traditionnelle mais déjà très obérée par les ponctions et les missions supplémentaires, à savoir la Défense Nationale. Bref, à tailler dans les muscles et non dans le gras pour essayer de ressortir de la nasse où l’on a eu la vanité de s’engager, exactement comme pour les aventures coloniales du passé.
Dès lors, la France va affaiblir ce qui fait sa puissance et non seulement sa grandeur à savoir son poids culturel, diplomatique, économique et de défense et donc continuer de péjorer, dans le contexte d’une Union purement continentale et du « colloque singulier » avec la RFA, sa capacité de négociation. C’est un enchaînement, une erreur majeure à ne pas commettre et un grave danger dont il faut dès à présent travailler à éliminer les causes. Ce n’est pas une question de gouvernements (puisque le phénomène a débuté sous Chirac et continué avec ses successeurs) mais d’analyse et de volonté politique. Etre ou ne pas être, to be or not to be, telle est une fois de plus la question et il vaudrait mieux mieux y répondre qu’à l’époque des « Quelques arpents de neige… », de la vente de la Louisiane ou en 1939…l’avenir même de notre nation est en jeu.
Le système culturel français, une clé à garder en main pour notre économie
Le côté culturel est essentiel car l’UE, telle qu’elle a été conçue dans sa période intermédiaire des années 80/90, était un ensemble équilibré et elle avait intégré le caractère indispensable de l’utilisation des langues de l’Union pari passu. En décalant vers l’Est son centre de gravité sous le prétexte fallacieux d’une mauvaise volonté britannique, en acceptant par contre l’utilisation plus ou moins systématique de la langue du "mauvais coucheur" qui ne fait rien d'autre que d'avoir conscience de ses propres intérêts, en se libéralisant toujours davantage et en laissant les Etats membres tricher avec leur propre électorat, l’UE affaiblit sa propre légitimité.
Ce qui est plus grave pour la France c’est que, sur le théâtre européen comme sur les autres, elle "cultive" une vision étroite et défensive de la culture, réduite à sa seule dimension artistique et assimilée à une dépense de luxe qu’il faudrait comme les autres modérer en période de crise ; elle continue à promouvoir une vision de la francophonie beaucoup trop pariso-centrée, refuse d’investir et professe une tolérance excessive face aux mauvais résultats du ministère concerné en matière d’enseignement des langues. Or l’osmose linguistique est un tout fondé sur l’échange et c’est en décomplexant les Français sur l’usage des langues régionales et étrangères qu’on refera de notre pays une puissance culturelle et diplomatique, dans le cadre européen entre autres mais pas exclusivement.
..comme notre capacité à innover
Car l’autre volet qui manque à cette politique c’est de comprendre que le plagiat ("bench marking") de structures étrangères n’est pas bon pour notre pays, habitué à concevoir de façon originale et dont le commerce extérieur affiche un déficit sidéral, proportionnellement beaucoup plus grave que son déficit budgétaire et lourd de conséquence pour notre économie : à quoi sert d'économiser sur les gommes et les crayons si l'on tue l'investissement et l'exportation ?
Qu’on songe qu’encore aujourd’hui nous bénéficions des retombées de la politique culturelle (au sens large, c’est-à-dire en y comprenant le droit, les normes, les initiatives économiques issues de l'adaptation de techniques étrangères, les prestations universitaires) etc.. de nos rois, empereurs et républiques. Mais le "bench marking" du passé n'était pas administratif ou fiscal, il ne cherchait pas à singer la structure d'autres états ou à découvrir l'improbable martingale permettant d'avoir une bonne gouvernance qui travaille pour rien. Il visait à s'approprier les talents et les savoir-faire d'ailleurs pour permettre à l'économie nationale de les exploiter puis de les réexporter, avec bénéfice. C'est cela (en simplifiant) que voulait faire Colbert, pendant que Fouquet voyait les solutions dans le tripotage des leviers de la finance publique au travers des "fermes générales" qui ont d'ailleurs réapparu daans les faits depuis quelques années (écotaxe, PPP etc.). Le Roi avait, lui, choisi Colbert. En Europe comme en France le conformisme, voilà l'ennemi.
Les conditions de l'Europe : honnêteté du dialogue...
Fermeté donc, mais aussi dialogue honnête et constructif avec Bruxelles qui, dans une large mesure ne fait que nous renvoyer notre propre écho. C’est en effet le Conseil Européen qui décide, ou laisse décider l’essentiel de ce qui se passe mais comme souvent, les décisions prises en syndicat n’engagent aucun dirigeant en particulier ; dès lors un certain énervement des instances bruxelloises est compréhensible, devant ce qu’il faut bien appeler une forme d’hypocrisie des gouvernements de certains états membres dont le nôtre, qui renvoient un peu facilement la paternité de décisions impopulaires à Bruxelles/Brussel/Brüssel (la Belgique est un pays trilingue !). De façon aggravante, la mise en forme européenne des décisions collectives ou non est systématiquement retardée par la bureaucratie française ce qui provoque souvent par un effet d’hystérésis leur transcription brutale dans la réalité de terrain en France.
Assumons donc dès le départ ce que des Français ont autorisé et renvoyons la responsabilité à nos négociateurs, en toute transparence mais avec vigilance.
Refus d'un fédéralisme aux pieds d'argile...
Parallèlement, présenter la Commission Européenne comme un proto-gouvernement européen alors qu’elle devrait rester le Secrétariat Général d’une assemblée super-territoriale dans l’application stricte du principe de subsidiarité, est une erreur et il est souhaitable qu’il soit dès à présent acté que l’évolution vers le fédéralisme soit interrompue.
Il est en effet inconcevable qu’on aille à marche forcées, dans un cadre géographique déséquilibré, dans un cadre idéologique discutable, dans un cadre politique à certains égards rétrograde et dans un cadre culturel inacceptable vers un abandon de souveraineté. Il n'est pas non plus acceptable qu'on joue le vote des électeurs à pile ou face, en lui disant en substance que l'application de la politique pour laquelle il a voté est soumise à une condition suspensive : le bon vouloir du "gouvernement" européen. Cela, c'est faire du fédéralisme sans le dire.
Or si on a bien sûr le droit d’être fédéraliste, on n’a pas le droit de chercher par ruse ou par abus de pouvoir à imposer aux citoyens cette conception dont les promoteurs ne sont d’ailleurs pas toujours eux-mêmes d'excellents connaisseurs, faute d’une culture historique et linguistique suffisante. Il est d’ailleurs remarquable que les grands Etats Fédéraux ou confédéraux ont souvent connu des guerres, parfois durablement traumatisantes comme aux USA, faute d’avoir été fondés sur des bases acceptables et acceptées par tous et qu’ils ne sont pas meilleurs que les autres. Le Nigéria est un Etat fédéral, l’URSS l’était aussi et la torture existe toujours aux USA…tout comme la peine de mort. De toutes façons, à force de gonfler ce ballon-là on risque de le faire exploser et de se retrouver avec dans la main quelques morceaux de baudruche. Est-ce intelligent ? L'idée européenne mérite-t-elle cela ?
Présenter par exemple une Europe fédérale comme une garantie anti-guerre est parfaitement spécieux et même, dangereux car ce qui a sauvé la paix lors de la guerre froide, c’est bien l’esprit de responsabilité des dirigeants russes et américains, non l’Europe qui continue à nourrir des foyers de conflit. Et vouloir pousser les feux d’une fédéralisation d’un ensemble hétéroclite tel qu’il existe en Europe actuellement n’est probablement pas très responsable ni même favorable au but voulu par ses propres partisans. Les peuples européens ont d’ailleurs, dans plusieurs cas dont le nôtre, marqué clairement leurs distances avec cette idée. Qu’on refuse de les écouter n’est pas un bon signe : visser en force le couvercle de la cocotte-minute n'est pas une politique, mais un comportement "magique". Plus tard, bien plus tard et quand les choses seront mûres, pourquoi pas ?
Refus de l' "Europe Chrétienne"
Si nos aïeux ont établi une République Une et Indivisible certes mais surtout laïque, après des rois qui pour la plupart étaient déjà loin d'être inféodés à Rome, ce n'est pas pour qu'au nom de pseudo-valeurs économiques (ou réputées telles) on nous impose un système politique d'inspiration plus ou moins confessionnelle. Il ne s'agit pas ici d'un procès d'intention. On peut avoir une assez bonne idée de ce concept, défendu entre autres par Robert Schuman (catholique fervent et qualifié justement de Père de l'Europe) et qui a largement nourri le projet de TCE au travers des "consultations" avec les dignitaires chrétiens, en parcourant le livre
de Jean BOISSONNAT, un excellent journaliste du non moins excellent journal "La Croix".
En substance on y défend l'idée, respectable bien sûr mais que nous ne partageons pas, que l'Europe arbitrerait en quelque sorte une forme de déchristianisation ( au travers du matérialisme envahissant des techno NdlR) contre la propagation des conceptions et valeurs chrétiennes dans un espace beaucoup plus large d'influence européenne, par exemple en aidant l'Ukraine à se libérer de l'influence russe (sic !) ou en acclimatant la Turquie pour qu'elle modernise (re-sic) l'Islam. Elle se sacrifierait ainsi sur l'autel du Christianisme pour le bien de tous.
Nous n'entrons pas ici dans la discussion de cette théorie, faible à nos yeux car nourrie de préjugés et de plus assez périlleuse car contenant en germe les mêmes dangers guerriers que l'idéologie US. Elle nécessiterait de plus un long développement qui nous éloignerait du sujet. Pour autant, il est important de rappeler ce point car elle constitue à peu près le seul repère idéologique de l'UE même s'il n'est pas explicite. Mais surtout il est en opposition totale avec notre propre système de valeurs et entre autres avec la Laïcité qui est devenue un facteur de cohésion essentiel aux 65 millions de Français, quelles que soient leurs origines.
Que dans d'autres pays on puisse très bien vivre et penser autrement et qu'on n'agisse pas nécessairement plus mal pour autant, c'est un fait. Mais l'identité ne se partage pas et contraindre un grand peuple, culturellement autonome et de surcroît moteur d'une communauté culturelle mondiale, à accepter des valeurs qui ne sont pas les siennes et desquelles il a réussi à se libérer, n'est pas envisageable. Or même si l'on écrit pas encore "In God we trust" sur les coupures en euros, on voit très bien que le train est en marche et que de façon cachée ou explicite une forme de propagande affaiblissant les valeurs de la République Française se développe (tolérance de l'UE vis-à-vis de pays membres de tradition chrétienne, réduction de la Laïcité à un combat anti-Islam, lissage progressif au bénéfice de l'idéologie libérale et anglophone, promotion d'une union privilégiée avec l'Allemagne etc.). Dans bien des ca d'ailleurs, ceux-là même qui véhiculent ces concepts pouvant paraître neutres voire positifs ne sont même pas conscients des conséquences mêmes de leur éventuel progression et croient bien faire.
Ce que nous voulons simplement dire c'est qu'une Europe confédérale, si elle doit un jour exister de façon pérenne, ne peut se fonder que sur des principes politiques et moraux explicites et acceptés comme tels, de façon révocable, par une large majorité populaire. Procéder autrement, sur la base d'un credo purement économique et en fondant en fait une Europe soi-disant indépendante sur une communauté de défense avec les USA, atteler de force un pur-sang à un char à boeufs, mènera inévitablement, les illusions une fois dissipées, à une partition dont on peut simplement espérer qu'elle ne sera pas violente. Alors, souvenons-nous que la soumission, le conformisme, la culture du court-terme communicationnel sont de très mauvais conseillers en politique et invitons nos dirigeants à s'en rappeler aussi.
Réalisme...
Il ne faut pas voir ailleurs la désaffection croissante du concept européen actuel, qu’il se traduise par le succès des populismes, la faveur du cartel des NON, l’abstention ou le faible succès du processus de désignation des commissaires et parlementaires européens tel qu’il est organisé par les Etats membres : à vouloir trop en faire, on finit par donner l’impression de vouloir échapper aux tâches nationales, bien réelles et immédiates celles-là ou de chercher à rejeter sur une « autorité » supérieure la responsabilité des échecs ou des contradictions d'une politique pour laquelle on s'est fait élire, en d'autres termes de rechercher un roi-soliveau.
Pourtant, pas plus que les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou l’Inde, un super-ensemble européen n’a de clés lui permettant d’espérer, dans les mêmes conditions, réussir davantage qu’un état important dans le cadre du court terme qui pour l’ instant, concerne une partie importante de la population en souffrance. Alors, pourquoi chercher à vendre à celle-ci l’idée que promouvoir ce qu’elle identifie comme la source de ses maux est une priorité essentielle ? Pourquoi ne pas se tourner, non vers de fausses solutions institutionnelles (plus gros, c'est mieux !?) mais vers un meilleur travail économique et politique pour mieux analyser, expliquer et concevoir des politiques novatrices, plus démocratiques, écologiques, proches des vrais besoins des gens ?
Qualité des femmes et des hommes...
En attendant, il faut construire. Il faut donc faire confiance à de futurs élus européens qui, loin de ne voir dans leur mandat qu’une voie de garage bien rémunérée et protégée (en France) par l’absence de circonscription locale définie, se consacrent à leur mission. Il en existe, comme par exemple Pervenche BERES, membre du PS et du Parti Socialiste Européen. Sévrienne, élue depuis des années au Parlement Européen, elle semble avoir fait sienne la politique « européenne » au point de voir dans son soutien à Martin SCHULZ, candidat allemand SPD/PSE à la Présidence de la Commission contre Jean-Claude JUNCKER, candidat conservateur (PPE) grand-ducal soutenu par la chancelière allemande, l'élément essentiel de sa campagne et de son action.
Beaucoup d’autres, hélas, sont des recasés de la politique nationale, d’anciens ministres n’aimant guère le cambouis local ou, tout simplement des politiciens professionnels sans grande qualification internationale, ce qui les prédispose à l’absentéisme.
Soit. Pour notre part, nous pensons que tant que l’Union Européenne accuse aussi d’aussi flagrants défauts de structure et ce malgré ceux de notre Constitution, les membres du Parlement Européen devraient pour l'instant rester des représentants de leur état d’origine et agir comme tels, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu’ils se fassent l’écho de leur gouvernement du moment. Mais pour avoir vécu dans cette moderne Capoue qu’est devenue Bruxelles pour les non-Belges et alors que tout se ligue pour rendre hors-sol nos élus à Bruxelles et Strasbourg, je peux comprendre qu’ils aient besoin de s’identifier à un concept collectif, aussi artificiel qu’il soit à ce stade, et de travailler à ce qu'il évolue.
En tous cas, même si Martin SCHULZ devait présider la Commission suite au processus des élections européennes, cela ne suffirait évidemment pas à "mettre l'Europe à gauche" et à résoudre les problèmes de fond mais cela y contribuerait certainement, donc pourquoi pas ? Pour autant, si l'on examine le parcours de l'UE, on n'a guère le sentiment qu'elle se soit éloignée du libéralisme pur et dur ni de la dépendance globale des Etats-Unis. Alors, le "changement" européen paraît bien aléatoire...demain, on rase gratis et l'Europe devient sociale ?
Diverses voies sont possibles
Mais on peut aussi voter pour les amis du PCF, NONistes certes mais sérieux dans leur travail au Parlement Européen et, à leur manière, cohérents ou encore pour EELV-Les Verts, des Fédéralistes convaincus voire fondamentalistes mais au nom de certaines vraies valeurs ? En tout cas, même pour un militant éprouvé de la gauche (mais pas d’une gauche asservie aux mots d’ordre d’états-majors sur des sujets dépassant le niveau partisan et les exercices de communication), il est devenu bien difficile de choisir.
Sans doute en est-il de même à droite où, depuis longtemps, les politiques proposées à l'UMP n'ont plus rien à voir avec le Gaullisme, sa vision et surtout ses pratiques même si l'on tente d'en garder le fonds de commerce politique. Alors, voter au nom des lambeaux déchiquetés du gaullisme "contre" ou au nom du libéralisme "pour" ?
A chacun son chemin donc, l’essentiel est d’en prendre un. Pour nous, ce qui compte est d’être dignes de notre passé, de notre culture et de notre avenir, pas seulement sur le continent mais partout ailleurs dans le monde. La France a sans doute un gros bout de chemin à faire avec l’avatar "UE" de l'Europe qui en a vu d'autres, si cette Union se révèle capable d’intégrer une contribution aussi essentielle que la sienne et si elle revient vers cet humanisme qu'après tout les Grecs, inventeurs de l'Europe et pionniers de la politique avaient initié. Mais il y a à cela des conditions et pas seulement au niveau de l’UE.
Bien calibrer le sujet, c'est l'essentiel pour que l'idée européenne soit pérenne..
Car, une fois de plus, la gouvernance européenne est d'abord un miroir. Elle ne saurait devenir non une porte de sortie ou une faiseuse de miracles, encore moins un club de nantis conservateurs.
Elle nous impose donc d’être, au niveau des dirigeants publics et privés et non du « peuple », beaucoup plus inspirés et exigeants avec nous-mêmes, d’en finir avec une pensée conformiste et l’esprit de parti dont il ne sort et sortira rien de bon et de reprendre de la hauteur. Elle nous impose de mieux, beaucoup mieux valoriser nos atouts actuels dans une négociation pour gagner du temps. Mais ce temps doit être utilisé non pour maintenir une stérile vision financière ou plutôt budgétaire en attendant l'embellie mais pour changer réellement. Changer l'Etat, ce n’est pas rogner le service public, déposer la chandelle derrière le dos des collectivités locales, taxer le moujik ou agiter quelques marronniers, c’est trouver de nouvelles voies vers une meilleure synthèse des énergies et des qualités nationales, dans le cadre européen ET le concert général des nations.
en ne se berçant pas d'illusions
Oui donc à une Europe où la France a toute sa place, non comme un illusoire Second Consul nommé à l'ancienneté mais parce qu’elle joue à nouveau un rôle moteur par sa capacité créative, son imagination, sa vision moderne d’une politique où service public et économie jouent leur rôle respectif sans pratiquer le mélange des genres ni le paradoxe, encore moins le laxisme vis-à-vis des intérêts économiques internationaux. Oui à une Europe qui ne passe pas par Pertes et Profits les fondamentaux sociaux, moraux, culturels au profit d'une culture matérialiste du Veau d'Or et qui parle allemand, français, italien, castillan, néerlandais, portugais, polonais...et anglais. Oui à l'Europe de la Renaissance plus encore qu'à celle des Lumières. Oui à une Europe qui intègre le Royaume-Uni, facteur essentiel de son équilibre géographique et aussi économique et politique : vouloir exclure la place de Londres du système financier continental est une entreprise vaine et contre-productive. Evitons l'obsession du fameux couple franco-allemand, devenu asymétrique, injuste pour les puissances moyennes ou petites donc contraire au principe même du fédéralisme. Ne projetons plus de fantasmes typiquement français sur l'Union européenne afin de mieux justifier notre propre auto-négation...En France, les périodes de défaitisme et de résignation sont souvent suivies d'éruptions citoyennes.
Une Europe exclusivement continentale n'a de sens ni pour la France ni par elle-même, elle court à l'échec. Depuis Charlemagne, la pauvre Europe a été mise à toutes les sauces par bien des gens et l'Histoire regorge d'empires éphémères partis pour durer très longtemps. Alors sachons soigner l'architecture du plat et donnons du temps au temps, sinon ce sera, à court ou moyen terme, l'explosion. La grenouille, ayant voulu se faire aussi grosse que le boeuf, explosera.
et en restant vigilants
S’il s’agit par contre d’un fédéralisme de principe, d’une entreprise organisée de dissolution culturelle sans valeur ajoutée particulière, de l’adoubement d’un roi-soliveau qui laissera tout faire en attendant d’être, comme dans la fable de la Fontaine « Les grenouilles qui demandent un roi », remplacé un jour par une grue croqueuse de batraciens naïfs, autant dire non tout de suite et dans l’intérêt de tous et refaire la copie. L’Europe des marchands, des industriels US, des Croisés, ou du Saint-Empire, non merci ! La Temple de l'argent et du conformisme, non merci !
Alors laissons peut-être une chance au schéma actuel mais soyons exigeants et vigilants, non seulement au moment du vote mais pour la suite des évènements et surveillons du coin de l’œil la marmite européenne : ce n’est pas toujours en France que l’on fait la meilleure cuisine ! Et pour commencer, VOTONS le 25 mai…dans ce sens !